Mise en garde : Cet article a pour but d’apporter des réponses aux PVVIH qui souhaitent avoir des précisions en ce qui concerne l’arrêt des traitements ARV. Nous ne faisons en aucun cas la promotion de l’arrêt du traitement. Nous souhaitons simplement proposer des pistes de réponses et de réflexion autour de cette thématique.
Il y a quelques semaines, une personne nous a posé des questions à propos de l’arrêt des traitements ARV. Nous recommandons toujours la prise de traitements ARV autant que possible. Pourtant, nous sommes bien conscient·e·s qu’il y a dans la vie, la théorie et la pratique. Parfois, il n’est pas possible, pour de nombreuses raisons, de maintenir une bonne Observance. Nous sommes donc allé·e·s à la rencontre du Dr Bertrand Lebouché, médecin de famille spécialiste VIH et hépatite C au service des maladies virales chroniques au Centre Universitaire de santé McGill (CUSM) pour parler avec lui des conséquences possibles de l’arrêt d’un traitement ARV.
Commençons par rappeler l’importance de l’observance. Dr Lebouché parle des médicaments comme d’un outil qui fait pression sur le Virus pour l’empêcher de se multiplier. Arrêter le traitement, c’est relâcher cette pression. Il utilise l’image du ressort dans une boîte en carton, “on appuie sur le ressort donc il est bloqué, on est assis sur la boîte. Si on le prend moins, il va ressortir. Et puis à force de le ressortir, parfois on arrive plus à le remettre dans la boîte, on arrive plus à le contrôler”.
Pour le Dr Lebouché, il y a deux types d’arrêts, ceux volontaires, décidés par le·a patient·e et ceux involontaires. Cet article revient sur ces situations particulières.
Les arrêts volontaires
Pour le moment les PVVIH qui ont un traitement prennent minimalement une pilule par jour, chaque jour. Il est évident que le VIH a un statut particulier et que ces traitements sont à prendre (pour le moment) à vie. C’est sûr que des personnes peuvent ressentir une fatigue à cette idée. Certain·e·s souhaitent faire des pauses de quelques jours, quelques semaines et c’est compréhensible. Cependant, selon le spécialiste, c’est une pratique qui peut-être risquée. Aux PVVIH qui pensent se “détoxifier” en faisant ces interruptions le docteur explique que “le VIH est plus toxique que les antirétroviraux. Le problème c’est que le virus il en profite lui pour s’installer, pour continuer ses destructions alors faut savoir ce qu’on veut”. Il y aurait également des personnes qui feraient des arrêt de fin de semaine. Le médecin se demande si ça vaut le coup ? En effet le risque est d’exposer ses partenaires à une transmission et aussi soi-même à un rebond viral ou encore à des résistances aux traitements.
Par rapport aux résistances possibles il explique “le gros problème de l’interruption c’est que le virus se multiplie en présence de traitements, il va créer des résistances. […] À la fin on y gagne pas quoi ! […] Quand on a réussi à trouver un traitement où [les PVVIH] arrivent bien à manager les effets secondaires, à ce moment là, les gens sont plutôt bien avec”.
Enfin il ajoute que si le problème est une question de Toxicité, il y a toujours aujourd’hui l’option des bithérapies, même si ce n’est pas encore prouvé par des études à long terme, on peut toujours se dire que prendre deux médicaments au lieu de trois est moins toxique pour le corps.
Les arrêts involontaires
Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles des PVVIH peuvent être amenées à arrêter leur traitement de manière involontaire. Parmi ces raisons, il y a le fait de subir une grande toxicité du traitement, une allergie, comme cela peut arriver avec n’importe quel autre type de médicament. Une interruption peut aussi être faite lors d’une opération, c’est non souhaité par le·a patient·e mais cela s’effectue avec le suivi d’une équipe médicale.
Dr Lebouché évoque également la possibilité de se retrouver sans traitement lors d’un voyage dans un pays où le fait de vivre avec le VIH est toujours considéré comme un crime. Dans ces régions, il peut être très difficile de se procurer des traitements ARV. Ces travel bans sont à prendre en considération lorsqu’on voyage et il est important d’anticiper le plus possible pour éviter de se retrouver dans cette situation.
Enfin, nous abordons avec Bertrand Lebouché ce qui constitue, selon lui, la majorité des arrêts involontaires dans la province, l’impossibilité de continuer à payer pour les traitements. De trop nombreuses PVVIH se retrouvent dans cette situation chaque année et ce, à cause de fin de droits d’accès à l’assurance maladie ou à une assurance privée… Ces arrêts sont, selon le praticien, un danger pour les personnes qui les subissent. Ils les placent dans une précarité face au VIH et augmentent considérablement le stress.
Que faire ?
Face à ces situations Dr Lebouché propose des solutions simples. Peu importe la raison de l’arrêt, il faudrait, selon lui, en parler avec son·a professionnel·le de santé. Ne pas rester seul·e. Si vous décidez d’arrêter, si vous avez oublié votre traitement pour quelques jours, si les imprévus de la vie sont passés par là, parlez-en lors de votre prochaine rencontre. En parler va permettre à la personne qui fait votre suivi d’avoir toutes les informations et de pouvoir vous aider au mieux en cas de problème. Il ne faut pas paniquer si l’arrêt est de quelques jours ou une fin de semaine. Cependant, si c’est prolongé il pourrait être nécessaire de contacter son·a soignant·e pour en parler et aborder la suite.
Il n’existe pas d’information claire sur le moment où une PVVIH Indétectable sous traitement redevient détectable après un arrêt, il faut donc être prudent·e pour ne pas risquer une transmission à ses partenaires. Utiliser un condom externe ou interne lors des relations sexuelles à ce moment là est la meilleure protection.
Pour les personnes qui se retrouvent sans accès aux traitements par rapport à une perte de statut ou de droits d’assurance, il conseille de la même manière d’en parler au plus vite à son·a professionnel·le de santé. “La plupart du temps on peut régler la situation en une journée, maximum deux jours. […] quand on a plus de quoi payer, il ne faut pas rester tout seul, il faut tout de suite aller voir son soignant”.
Enfin, nous avons conclu notre entretien avec le Dr Lebouché sur un pensée d’espoir par rapport à la guérison du VIH. “Il n’y a pas de raison, on va réussir à trouver une cure du VIH. Je pense que ça va surtout fonctionner chez les gens qui sont bien contrôlés. Actuellement on prend [les traitements] à vie mais on va peut-être bientôt avoir une nouvelle vie ou il y aura plus à faire ça”.
En attendant de telles bonnes nouvelles n’hésitez pas à parler avec votre soignant·e de votre traitement et de votre ressenti par rapport à la médication. Si vous vous retrouvez dans une situation où vous n’avez plus la possibilité d’avoir accès au traitement, parlez-en à votre médecin.
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