«Ça va finir par finir»

L'intersection entre l'art, le VIH, et le militantisme

Le 19 septembre dernier, le Portail VIH/sida du Québec (PVSQ) a eu l’honneur de présenter en avant-première son court-métrage documentaire intitulé « Ça va finir par finir » au Centre PHI. Ce qui suit est une version abrégée du texte de présentation qui a été lu en introduction à la soirée.

Pendant les deux ans et demi qu’a duré la production de « Ça va finir par finir », au PVSQ, nous avons été portés par nos questionnements au sujet de l’imaginaire collectif autour du VIH. À quoi on pense quand on pense au VIH? Quels sont les préjugés que les gens ont? Dans la tête de monsieur, madame et Mx tout le monde, ça ressemble à quoi, une personne qui vit avec le VIH?

Sans grande surprise, on s’est bien rendu compte que l’image collective que les gens entretenaient était un peu floue, suspendue quelque part entre un passé tragique et cruel, et un présent insaisissable où le danger semble écarté, mais où le VIH demeure tout de même une menace. Une menace qui concerne surtout les autres, ceux qui ont un certain mode de vie, une certaine apparence –ou alors on ne sait pas trop– mais pas moi, pas mes amis, pas ma famille. Le VIH, c’est un vieux souvenir, nommé sida, que l’on refoule pour oublier les affreux dégâts d’une époque que l’on voudrait déjà révolue. Le VIH, dans l’imaginaire collectif, c’est comme un bricolage d’histoires d’horreur qui aboutissent nécessairement en un éventail de malheureuses conséquences : apathie, peur de l’autre, sexualités aliénées et stigmatisées, mais surtout, la continuité d’une pandémie qui continue son chemin dans une indifférence affligeante, des vies bousculées et transfigurées par la violence et la négligence.

Face à ce constat somme toute négatif, qu’est-ce qu’on pouvait bien dire? Ou plutôt, qu’est-ce qu’on voulait dire? Quel message est-ce qu’on voulait transmettre pour actualiser le visage du VIH? Ça ne vous aura pas échappé, mais il y a très peu de vedettes, de politiciens ou d’autres personnalités publiques qui arborent la Séropositivité comme on le ferait avec un trophée. Il y a assez peu de capital social ou culturel à récolter avec un sujet aussi tabou et si peu… sexy.

Et pourtant! Le VIH et le sida ont laissé sur leur route des sillons tellement riches d’histoire, de lutte, d’entraide, de découvertes scientifiques. Un traumatisme aussi percutant ne peut faire autrement que d’engendrer la reconstruction là où il a frappé. Le désespoir peut, contre toute attente, donner lieu à la créativité, inspirer, et gonfler à bloc les voix de celles qui veulent le changement. Ou plutôt de ceux qui exigent le changement.
Oui, finalement, c’était ces histoires-là qu’on voulait honorer. Les histoires de militantes et de militants qui commandent l’action, les récits de celles et ceux qui se sont emparés de leur tout petit stylo pour rédiger iels-mêmes la suite de l’histoire. Et on s’est rendu compte que ces gens-là, ce n’étaient pas “les autres” ou des personnes floues que personne ne connaît. Non, ces gens-là, ce sont nos amis, nos pères et nos mères, nos oncles, sœurs, le caissier du dépanneur, la comptable à la banque… Autant de personnes ordinaires au parcours extraordinaire. Des artistes qui trouvent de la beauté là où les autres ne voient que la mort. Des activistes qui hurlent là où les autres préféreraient le silence.

Le silence, c’est la mort, ça a déjà été dit.
Il est donc là, le vrai visage du VIH aujourd’hui : anonyme ou en pleine lumière, aussi multiple que les formes que peut prendre l’amour. Parce que oui, il y a la colère, l’indignation, il y a la tristesse et la rage après plus de quarante ans de combat contre ce foutu Virus. Mais à la base, il y a surtout l’amour.

 Guillame Tremblay-Gallant,directeur général du PVSQ

Photo: Laurence Philomène

Vous souhaitez en savoir plus au sujet du film «Ça va finir par finir» ? Vous pouvez la réalisatrice du projet, Nancy, à: nancy@pvsq.org ❤️